Application de la loi immigration : un « recul sans précédent des droits fondamentaux »

À l’unanimité, les membres de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) ont critiqué sévèrement la loi sur l’immigration, soulignant qu’elle représente un recul sans précédent des droits fondamentaux.

La CNCDH s’est réunie jeudi 26 septembre 2024 pour la première plénière. Après avoir adopté deux déclarations portant sur l’application de la charte sociale européenne aux territoires ultramarins et sur l’exécution des décisions de la Cour européenne des droits de l’Homme, les membres de la CNCDH ont longuement débattu d’un avis sur la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration.
Cet avis a été adopté à l’unanimité.
Bien que cette loi ait été adoptée fin 2023, il était important, pour la CNCDH de dresser un premier bilan de l’application de la loi et d’alerter sur les conséquences graves sur les droits fondamentaux que cette réforme implique, dans la continuité de ses avis précédents.
En effet, les premières déclarations des nouveaux premier ministre et ministre de l’intérieur s’inscrivent malheureusement dans la continuité d’une instrumentalisation politique de la question migratoire.
Alors que plus de 20 lois relatives à l’immigration ont été adoptées au cours des 40 dernières années, celle-ci marque un recul inédit des droits fondamentaux en matière de respect des droits humains.
Ainsi, la CNCDH a pris un certain nombre de recommandations, dont voici les principales :
• La CNCDH insiste sur l’urgence d’une réforme de la procédure de régularisation des travailleurs sans papiers en France.
• La CNCDH recommande de supprimer la subordination du droit au séjour à des exigences accrues de compétences linguistiques.
• La CNCDH recommande de supprimer la disposition augmentant la durée de validité à trois années d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF).
• La CNCDH réitère sa recommandation d’interdire la rétention administrative de tout enfant, mineur de 18 ans, accompagné ou non, dans tous les lieux d’enfermement et sur tout le territoire français, y compris dans les Outre-mer.
• La CNCDH alerte sur la multiplication des fichiers concernant les mineurs non accompagnés (MNA), qui ne renforcent pas leur protection et, au contraire, accentuent la suspicion à leur égard. Elle préconise plutôt d’augmenter les moyens budgétaires alloués aux départements pour la protection de l’enfance.
• La CNCDH recommande la suppression du motif de clôture de la demande d’asile en cas d’abandon « sans motif légitime » de l’hébergement. Elle souligne que cette mesure risque de priver des milliers de personnes de la protection internationale, notamment les victimes de violences qui pourraient ne pas être en mesure de justifier un « motif légitime ».
• La CNCDH recommande une adaptation du parc du dispositif national d’accueil, afin que tous les demandeurs d’asile qui le souhaitent puissent être hébergés dans des conditions dignes. La CNCDH souhaiterait que ces hébergements prennent en compte les vulnérabilités du public accueilli (PMR, mère seule, femme victime de violence, public LGBT, etc.) et qu’un accompagnement adapté leur soit proposé.
• S’agissant des femmes, la CNCDH recommande d’améliorer leur accès à la demande d’asile en prenant en compte les violences liées au genre. Elle préconise, notamment, la formation des agents de préfecture et de l’OFPRA pour mieux appréhender les violences subies et offrir un accompagnement adapté, incluant le soutien psychologique et médical ; et de leur accorder aux femmes victimes de violences liées au genre une protection internationale, en les reconnaissant comme appartenant à un « groupe social » au sens de la directive 2011/95.